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Été 1900 - Le soleil du nouveau siècle



Un été intensément chaud s'est installé sur le domaine Labra en ce début d'année 1900. Le vent auparavant si doux a laissé sa place à un air sec et irritant & le soleil jadis taquin maintenant omniprésent frappait sans répit le sol de ses rayons. Les plantations manquaient d'eau malgré les bons soins prodigués par les ouvriers et devaient enfoncer leurs racines encore plus profondément dans la terre pour tenter de trouver les minéraux nécessaires à leur survie. Le thermomètre explosait tous les records & partout au village le sujet des répercussions de ce temps si lourd était le principal sujet de conversation.

Hélas la fournaise n'était pas le seul adversaire du moment. En effet, arrivé depuis peu, le phylloxéra (petit insecte vorace dévoreur de cultures) faisait des ravages & Jamil était vraiment très inquiet pour ses rendements. Cette espèce de petit puceron glouton s'attaquait à tout, même aux jeunes plants pas encore mâtures ... & il n'existait aucun traitement pour l'arrêter.

Chaque matin Jamil & son employée constataient les dégâts, comme en temps de guerre on compte les morts & les conclusions étaient amères. Près de 57% de l'exploitation périt sous les dents de ce petit parasite suceur de sève. La famille n'eut alors d'autre choix que de renvoyer l'ouvrière ; n'ayant plus assez de travail.

La serre autrefois si vivante qu'on se serait crû dans une jungle du Sud apparaît désormais bien amoindrie & vide ; seuls restèrent quelques plants de légumes résistants & les non germés qui n'ayant rien à offrir à l'hémiptère barbare eurent la chance d'être épargnés.




Malgré ce coup dur qui affecta les finances familiales, les larges économies faites par eux pendant les saisons précédentes furent suffisantes pour payer les travaux d'améliorations prévus. En effet l'entrée dans ce nouvel ère avait amené de grands changements !

Une vraie petite révolution industrielle arriva, née de l’électricité. Finis les risques d'incendies avec toutes ces bougies partout ! Le textile progressa également de manière fulgurante ; les murs furent tapissés de larges bandes de papiers peints à boiseries ou à rayures. Envolées les planches de bois sombres place aux tentures !

La maison gagna en clarté & en fonctionnalité, pour le plus grand bonheur de Rayise qui put ainsi moins passer de temps à lessiver les cloisons.



Et bien évidemment cette mise en valeur de la maisonnée fût l'excuse idéale pour Jamil, il put ainsi cacher le drame agricole qui frappa. Surtout que dans le foyer l'heure était à la fête ; en effet Jeanne se marie ! La jeune femme a enfin officialisé avec son fiancé Morgan & comme pour sa sœur précédemment la cérémonie a lieu sur le domaine. La décoration fût dans le même style avec ballons colorés & fleurs chatoyantes.

Ces messieurs, de nouveau réunis, s'installèrent confortablement sur les fauteuils blancs & attendaient en discutant l'arrivée de la jeune mariée. Celle ci était occupée à passer sa robe aidée par sa mère & sa sœur aînée, venue tout spécialement pour l'occasion avec son mari & malgré son ventre énorme de femme enceinte.



Comme le veut la tradition des Labra la jeune femme reçut 30.000 $ de dot & un collier en cadeau, des perles blanches de culture venus de l'Ouest ; qui sublimèrent sans efforts par leur éclat virginal la magnifique robe sirène que Jeanne avait choisie chez la confectionneuse.

La coupe était encore une fois en bustier, mais avec un décolleté plus profond cette fois, en forme cache-cœur. Le côté voile drapée avait été conservé sans oublier l'habituelle piqûre sur le côté gauche pour le maintien, sertie cette fois de perles blanches.




Rayise une fois encore dû réprimer la petite larme de fierté qui perla au bord de ses yeux & la jeune femme pût alors s'engager sur le tapis rouge molletonnée vers celui qui dès le départ avait été l'homme de son coeur. La météo ne fut pas très sympa & le ciel se couvrit rapidement. Heureusement la pluie ne s'invita pas à la fête & tout le monde put profiter de la cérémonie et se délecta du délicieux gâteau.




Mais il ne saurait être dit que les bonnes choses n'ont pas de fin & ce fut dès la clôture des réjouissances que notre jeune couple quitta le foyer. Il était temps pour eux de faire leurs vies ; leur propre maison les attendait de l'autre côté de la vallée & c'est les yeux dans les yeux qu'ils entamèrent d'un même pas ce nouveau chemin vers leur vie à deux. Nous aurons d'ailleurs bientôt de leurs nouvelles !



Au niveau de la fratrie restante, un seul changement notable fut à signaler. Louis le rebelle était enfin devenu jeune adulte & malgré son adolescence plutôt agité il semblait s'être assagi depuis quelques temps. Sa mère soupçonnait bien qu'une femme devait être à l'origine de tout ça mais le jeune homme ne laissait rien filtrer.

Quand au patriarche il était trop pris par son affaire pour remarquer l'amourette de son aîné. Il comptait d'ailleurs toujours sur le fait qu'il était son héritier et le développement d'une nouvelle passion de Fabriquant qu'avait acquis le jeune homme en revenant à la raison ne déplaisait pas au vieillard. Son fils ferait un excellent homme d'affaires si ce dernier y consentait.

Mais secrètement le jeune homme aspirait à une toute autre vie & c'est dans les bras d'Olivia, la fille de la postière, qu'il rêvait d'échapper à la pression familiale ...