[Decade - TERMINÉ] Les Meunier à travers les âges

La petite famille était désormais bien installée dans ce penthouse, et le temps allait venir pour Valérie de fêter son anniversaire. Ca ne lui plaisait pas plus que ça, elle serait bien restée un peu encore le bébé de la maison, mais il se disait qu'un autre bébé n'allait pas tarder à arriver. Sa cousine Flo essayait de lui montrer que c'était drôle de grandir, mais c'était Keme qui arrivait le mieux à dérider la petite. il lui disait que tout le monde était venu pour la célébrer elle, Valérie ! Ses oncles, tantes cousins, et même son père. Elle allait être la reine du jour et Annie avait déjà préparé ses nouveaux habits de grande.


Les tantes étaient effectivement toutes là. Même si Nancy semblait un peu fâchée par la tâche que Flo avait fait sur son pantalon...


Guy était tout excité par l'anniversaire de Valie, ah oui et puis surtout il avait eu un bébé ! Un petit Jérôme qui dormait dans son couffin dans un coin. Annie et son frère étaient ravis d'avoir des bébés en même temps, des cousins du même âge qui allaient pouvoir jouer ensemble. Un petit campagnard et un petit citadin.


Isabelle était heureuse et n'avait pas peur de le faire savoir. Clyde n'avait pas pu venir, mais il aurait bien voulu. Maintenant que les choses étaient claires, il n'avait plus peur de se faire casser la figure par Jeff ! Jeff qui tardait un peu à arriver d'ailleurs. Certes ça n'avait jamais été son trucs les fêtes de famille, mais pour l'anniversaire de Valie, il pourrait faire un effort, pensait Annie. Ce n'était pas comme si elle lui demandait grand chose. Elle était même plutôt conciliante, il venait voir sa fille quand il voulait, comme il voulait, on n'exigeait rien de lui. A part de venir pour son anniversaire.


La petite sauterie était réussie en tout cas, tout le monde semblait content de se voir. Et Flo se demandait un peu si c'était du lard ou du cochon ce que racontait Tonton Keme. Vraiment, les indiens avaient pour habitude de sacrifier un enfant à chaque pleine lune ?
"Arrête de faire peur à ma fille, Keme" rit Guy "C'est toi que j'appellerai quand elle n'arrivera pas à dormir cette nuit!"


Avec un peu d'inquiétude, Valie finit tout de même par souffler ses bougies, sous le regard lointain de son père qui avait fini par arriver, mais n'osait pas trop se mêler à cette foule de Meunier. Il était mal à l'aise, mais il était là quand même.


Et voilà notre petite anniversée !


A la demande de sa fille, Jeff finit pas accepter de venir prendre un hot dog avec tout le monde. Enfin, en restant un peu en retrait.
"De toute manière il y a trop de monde, on peut plus s'asseoir" commenta Frédéric.


C'était vrai que ça faisait du monde, et encore on n'avait invité que la famille proche. Qu'est-ce que ça aurait été si Annie avait invité aussi ses cousins comme elle avait failli faire ! On n'avait pas idée de faire autant d'enfants aussi, ça rendait les réunions familiales plus proches du colloque que du dîner !


En parlant de faire des enfants d'ailleurs, il commençait à lui faire un peu mal à Annie ce dos ! Ca revenait par vague et... Oh non, elle n'allait pas gâcher la fête de Valie et mettre au monde son bébé en plein milieu quand même ? Elle serra les dents pour faire bonne figure, ça attendrait bien que Valie soit couchée, non ? Ouch, ça revenait déjà...


Le soleil commençait à tomber et chacun décida qu'il était temps de reprendre la route. Même si pour certaines une petite marche suffirait à les ramener chez elles. Guy et Nancy, eux, avaient quelques kilomètres à faire et trois enfants à coucher. On s'embrassa et se promit de se revoir très vite.


Valérie, comme une grande, raccompagna son père à l'ascenseur, sa mère avait l'air de se mouvoir difficilement ce soir. Elle le remercia d'être venu. Il devait partir pour une petite série de concerts, mais il reviendrait bientôt. Sans qu'on ne le lui ait jamais vraiment expliqué, Valérie se rendait bien compte que sa famille n'était pas comme toutes les autres. Il y avait son foyer, sa mère, Keme et ce futur bébé, c'était son quotidien. Et puis il y avait ces imprévus, ce papa qui ne prévenait jamais avant de débarquer, qui offrait un cadeau, ne parlait pas beaucoup. Mais elle était toujours surexcitée quand il arrivait ou quand elle recevait une carte de lui. Elle comprenait qu’il était une véritable star, on voyait ses clips à la télévision, on entendait ses chansons à la radio. Elle trouvait que c’était plutôt une bonne excuse pour ne pas être là très souvent.


Keme envoya Annie se reposer et se chargea du ménage. Elle n'avait pas l'air très en forme ce soir, la fatigue de la réception. Qu'il avait hâte de rencontrer enfin ce bébé. Son bébé...


Après avoir tout rangé, lui aussi alla se reposer. Il somnola et rêva qu'Annie accouchait enfin, le grand jour qu'il attendait tant.


Et d'ailleurs, à l'étage Annie s'était réveillée avec de violentes douleurs, ça avait augmenté d'un seul coup et elle sut qu'elle n'avait pas le temps d'aller à la maternité, ni même d'aller chercher Keme.


Cédric était arrivé sans crier gare, très pressé de venir compléter ce foyer.


Evidemment, Annie alla chercher Keme tout de suite. Elle avait déjà vécu la parentalité seule, aucune intention de recommencer ! Qu'il lui donne donc le biberon pendant qu'elle allait prendre un bain.
En tenant ce petit bout d'homme dans ses bras, Keme sentit son coeur fondre. Est-ce que c'était possible d'aimer autant un petit être qui ne faisait pas encore vraiment partie de sa vie ce matin ? Ca, il était prêt pour seconder Annie dans tout !


Et c'était même avec plaisir qu'il préparait le petit déjeuner pour tout le monde chaque matin. Annie n'était pas loin de se dire qu'elle était tombée sur la perfection faite homme ! Surtout quand il oubliait négligemment de boutonner sa chemise pour faire à manger... Attention aux risques de brûlure quand même hein...


C'était bien souvent lui qui s'assurait que Valérie prenne un solide petit déjeuner avant de partir à l'école. Annie avait de plus en plus de responsabilités au parti, et pas tant de temps que ça à elle. il allait bien falloir qu'elle en dégage, du temps, mais pour le moment elle savait que Keme assurait à la maison.


Elle essayait de temps en temps de caser des rendez-vous professionnels à domicile, ça lui permettait de concilier un peu vie professionnelle et vie familiale. On lui avait déjà fait des remarques sur sa tenue, si elle voulait être crédible il fallait manifestement qu'elle s'habille en dame... Mais Annie ne se sentait pas du tout elle-même dans ces vestes à épaulettes. Elle avait tranché, elle voulait bien mettre un tailleur pour aller au parti, mais si les gens venaient chez elle, ils la prenaient telle qu'elle était ! Et puis à vrai dire, ce matin elle n'avait pas vu l'heure, elle était encore un train de changer Cédric quand son interlocuteur était arrivé. Enfin, lui non plus n'avait pas l'air très regardant sur la tenue cela dit ! Annie trouvait ça vraiment bien trivial ces histoires de fringues.


Pendant que sa mère travaillait, quand Keme était au journal, Valérie allait jouer avec son petit frère. Il ne faisait pas encore grand chose, mais ça le faisait beaucoup rire de voir sa soeur lui faire des grimaces. "Tu verras, ce sera lui ton plus grand fan" avait dit sa mère.


Ca devenait de plus en plus compliqué de sortir faire son jogging dehors, avec les enfants à surveiller. Pas de problème, Annie avait découvert l'émission Gym Tonique, et elle faisait son aérobic devant. Il fallait perdre les quelques kilos de la grossesse. Keme disait tendrement qu'il ne voyait pas de quoi elle parlait, mais Annie savait bien qu'il fallait tonifier tout ça. Véronique et Davina étaient devenues ses meilleures alliées.


Lui aussi d'ailleurs s'était mis au sport à domicile, mais pas question de se dandiner devant la télévision, quel que soit le temps il faisait ses longueurs dans la piscine. En râlant un peu sur l'énorme matelas gonflable qui prenait toute la place. Mais Annie avait insisté pour l'acheter, il allait tellement plaire à Valie... Et Keme ne savait rien refuser à Valie, ni à Annie d'ailleurs.


Et Cédric, est-ce que lui aussi allait le faire tourner en bourrique ?
Ce bébé avec ses origines françaises, anglaises, polonaises et amérindiennes, le petit américain par excellence. Ce pays était multiculturel, c'était ce qui en faisait sa richesse, mais Cédric, comme son père, pouvait affirmer avoir du sang américain vrai de vrai. Annie avait proposé de lui donner un prénom algonquin, mais Keme n'avait pas voulu. Sa culture, il la lui raconterait à son petit loup, mais le racisme envers les populations autochtones était encore trop présent, il ne voulait pas que son fils ait à en souffrir. Lui-même Keme, était toujours à la rubrique chiens écrasés, alors qu'il travaillait au journal depuis presque cinq ans. Mais les préjugés étaient là, les "indiens" étaient perçus comme des fainéants alcooliques, sur qui on ne pouvait pas compter. Alors son fils s'appelait Cédric Meunier. Lui-même à l'état civil s'appelait Keith Silverwolf, ce qui n'était pas évidemment son véritable nom. Pourquoi transmettre un nom qui n'était pas le sien à son enfant ? Et puis son nom algonquin était imprononçable en anglais comme en français. Plus tard, en revanche, il lui enseignerait leur dialecte. Et peut-être qu'il l'emmènerait sur la réserve où il avait grandi... Cédric Mahigan Meunier. Annie avait insisté, elle voulait qu'il lui donne au moins un deuxième prénom dans sa langue. Mahigan signifiait Loup, c'était naturel de le lui donner. Il lui apprendrait leur dialecte, cette langue ne devait pas se perdre, ça Keme le savait.
Annie savait ce que c'était d'avoir des origines qu'on ne connaissait pas. Leur père parlait parfois de la Pologne, pour leur raconter des souvenirs de son enfance, mais il n'avait gardé aucune coutume, il ne leur avait pas appris cette langue. Lucienne disait que c'était parce que ça le faisait souffrir d'y penser, il avait préféré garder ça au fond de son coeur, bien enfoui. C'était la langue maternelle de son père et elle ne savait pas dire tellement plus que "Kocham cie" "je t'aime" qu'il leur disait parfois en les embrassant. Un jour, elle prendrait des cours de polonais.


La famille, les racines, Annie savait à quel point c'était important. Et ça semblait d'autant plus important à Guy depuis qu'elle avait une piscine chez elle ! On ne l'avait jamais autant vu le frangin. Ca permettait de constater qu'il s'empâtait un peu également et elle ne manqua pas de le lui faire remarquer en le taquinant. Enfin, tant que c'était égal à Nancy !
C'était Valie qui était ravie d'avoir du monde à la maison, avec Annie et Keme qui travaillaient comme jamais, elle avait bien besoin de compagnie. Et sa tante Isa avait toujours été sa préférée, mais ne le dites pas aux autres.


Pendant ses instants de solitude, elle se mettait au piano. Jeff lui avait donné quelques cours, et elle jouait "au clair de la lune" en s'imaginant une foule délirante à ses pieds.


Annie regardait les premiers pas de sa fille en musique, c'était encore balbutiant, mais nul doute qu'elle allait apprendre vite. La digne fille de son père. La petite mettait souvent la radio et Annie l'encourageait à écouter la radio québécoise. Le Canada avait deux langues officielles, le français et l'anglais, mais en Ontario on était en territoire anglophone. Lucienne qui avait grandi au Québec avait appris le français à ses cinq enfants, contrairement à Isaac, elle tenait à ce que ses enfants parlent la langue de ses ancêtres. Annie essayait de faire de même avec sa fille. Elle lui passait des chansons françaises et ils recevaient quelques chaînes françaises et québécoises à la télévision. L'anglais, elle l'apprenait déjà tous les jours dans la rue et à l'école. Annie, elle, s'exprimait indifféremment dans l'une de ces deux langues, comme ses frère et soeurs.
Elle avait souri lorsqu'elle avait entendu sa fille chanter le dernier tube d'un chanteur français, Michel Berger "La groupie du pianiste". Valie n'avait pas idée à quel point cette chanson était l'histoire de ses parents. Ca faisait sourire Annie d'entendre la petite l'entonner à tue-tête, bah au moins elle apprenait le français !
"Elle passe sa vie à l'attendre, pour un mot pour un geste tendre. Elle l'aime, elle l'adore, plus que tout elle l'aime, c'est beau comme elle l'aime"
Ah qu'elle était loin cette époque, mais elle avait eu le mérite de donner cette jolie petite fille.


Jeff, Annie pensait à lui encore parfois. Ce jour où elle apprit la mort de John Lennon. Et pas si loin que ça, là-bas de l'autre côté du lac Ontario... Ca avait été une des idoles de leur adolescence, on l'avait assassiné, ça lui faisait un sacré choc. Comme si c'était sa jeunesse qui s'était pris un coup de couteau... Keme trouvait ça triste, la mort d'un homme, surtout à quarante ans à peine, c'était évidemment un drame. Mais il ne comprenait pas, il n'avait pas regardé le Magical Mystery Tour avec elle, cherché les sens cachés dans « Strawberry Fields » et « I am the Eggman » pendant des heures...


Annie avait passé un coup de téléphone à Jeff, est-ce qu'il ne voulait pas qu'ils se retrouvent en ville ? Il y allait avoir un rassemblement en plein air en hommage à John. Jeff était aussi dévasté qu'elle, il avait passé la journée en studio à jouer des chansons des Beatles.


Quelqu'un diffusait "Imagine" en boucle depuis son balcon. Tous deux essuyèrent une larme. L'assassinat de Lennon, c'était toute une page qui se tournait, la fin d'une époque.
"Dis, tu crois qu'ils avaient fini par se réconcilier avec Paul ?" demanda Annie
"Mais oui, regarde, tu as bien réussi à me pardonner à moi, je suis sûr que Paul et John se sont quittés amis! »
Ca, c’était important pour Annie.

Bonus :

Quand je cherchais un deuxième prénom pour Cédric, et que je suis tombée sur "AHCHUCHHWAHAUHHATOHAPIT" voilà, voilà... J'ai eu peur de ne pas réussir à le ré-orthographier dans un prochain chapitre.
Ce site dit d'ailleurs que Keme signifierait "secret" plutôt que "tonnerre", bon bah on dira qu'il y a plusieurs significations. J'ai vraiment galéré quand j'ai cherché le prénom de Keme ?

Je suis assez déçue de ne pas avoir trouvé de CC vestes à épaulettes, pour moi c’est tellement ça le look « maman » des années 80 ! Du coup, Annie a gardé des tenues d’éternelle ado. Ca lui va bien je trouve.


Jeff panique pour la naissance de Cédric... Euh gars, c'est pas le tien celui-là, respire !