[NSBC- G3] La dynastie des Berrington (MAJ 04/03)

J'adore mon boulot ! Si, si, je vous jure, même si j'ai envie de baffer mes collègues, je fais des trucs passionnants. Entre les recherches sur la vie extra-terrestre, les appareils que je construis... Je m'éclate ! Là, ça ne se voit pas des masses, parce que je suis méga concentrée.


Mais, avec R2 (mon co-pilote robot dans mes expériences), on vient de mettre au point le rayon sim. Je crois que ce truc va m'être d'une grande aide. Je vais pouvoir transformer des objets, et surtout... geler les gens qui m'agacent ! Et il y en a deux-trois ici, vous le savez.


"Ah non, pas question de donner mon ADN à un Berrington, je n’ose imaginer ce que tu vas faire avec !"
Parce qu'entre Machinette qui refuse que je lui colle un coton-tige dans la bouche, pour que je fasses des expériences...


Et l'autre Pancakes là, qui n'est bizarrement jamais dispo quand j'ai besoin d'un coup de main, elles commencent à me chauffer doucement. Alors ça suffit la docile Skye qui essaie de faire profil bas pour s'intégrer, maintenant je vais leur faire comprendre : JE NE SUIS PAS UN PAILLASSON ! Merci, de s'essuyer les pieds sur quelqu'un d'autre.


Ah ah, ça va, pas trop froid là-dedans ? T'inquiète va, ça va finir par fondre. En attendant j'ai la paix. Et s'il faut tous les y faire passer, j'ai le temps moi !


Il n'y a pas qu'au travail que ma nouvelle devise me suit. Dans ma vie personnelle non plus, on ne me marchera plus dessus, parole de Berrington ! Vous vous rappelez Nico ? Le blondinet un peu béta dont j'avais fait mon quatre heures ? Il ne me lâche pas, faut croire que ça ne lui a pas suffit la paire de baffes qu'il s'est prise. Par contre quand il s'agit de Papa, il m'affirme toujours qu'il n'est pas une bonne influence sur moi. Il est sérieux ? C'est la seule influence que j'ai eu, c'est lui qui m'a façonnée ! J'ai arrêté de décrocher le téléphone quand je vois "Nico", mais puisque le ghostage n'a pas l'air suffisant... Je me suis mise au vaudou. Hey, il faut ce qu'il faut. Tiens, tu veux te mettre la tête dans un verre d'eau ? Attends, je m'en occupe, cadeau de la maison.


Et plaf, tiens prends ça aussi tant qu'on y est ! On verra si t'as toujours envie de m'appeler.


Faites bien passer le message, désormais Skye Berrington, elle mord ! Pas de quartier.


L'autre soir, j'ai reçu la visite de Papou, il avait l'air tout préoccupé, je ne l'avais jamais vu comme ça. Evidemment, ça m’a inquiétée.


Il a essayé de faire diversion, il m'a demandé comment ça se passait au travail, avec mon petit-ami...
"Alors pour le boyfriend, tu peux oublier, un goujat de première." lui ai-je répondu "Et au labo, tu sais que mes collègues avaient un peu tendance à me chercher des noises ? J'ai trouvé la parade parfaite, j'ai créé un genre de pistogel, pouf ça les transforme en gros blocs de glace ! Tellement drôle !"
"Quoi ? Mais enfin mon petit oiseau des îles, ce n'est pas comme ça que tu vas améliorer ta réputation... Tu m'inquiète tu sais. Tu dis que tu n’as besoin de personne, mais ce n’est pas vrai, je ne peux pas être toute ta vie ma chérie…"
"Ma réputation, si tu savais ce que je m'en contrefiche ! S'ils sont trop bêtes pour ne pas voir plus loin que le bout de leur nez, c'est pas mon problème, je ne vais pas m’entourer d’abrutis. Je te promets que je suis heureuse comme ça."


Et alors là, le drame, Papa s'est mis dans tous ses états.
"Mais... Papou... Qu'est-ce que j'ai dit ?"
"Rien, rien du tout ma chérie. C'est de ma faute si tous ces gens ne sont pas justes avec toi, j'en suis malade. J'étais là pour te protéger, par pour faire de ton monde un enfer ! On dirait que j'ai tout raté..."
"N'importe quoi Papa ! Relève la tête, tu n'y es pour rien si les gens sont débiles. Tu me permets de faire le tri, au contraire. C’est toi qui fais ma force !"
«  Ecoute ma chérie, je voudrais que tu puisses te faire ta propre opinion sur tout ça. Tu es grande maintenant Skye, peut-être qu'il est temps que tu saches pourquoi j'ai été mis à la porte du laboratoire. Je n'ai pas très envie que tu en apprennes une version déformée, par quelqu'un d'autre."
Ok... Je suis un peu anxieuse d'un coup.


"Tu sais que le drame de ma vie a été de perdre ta maman... Dorothy était une femme magnifique, solaire, j'en suis tombé amoureux au premier regard. Je ne m’étais pas aperçu que ma vie avait été morne avant elle, sans relief. J’étais un peu comme toi, j’avais mon travail, je pensais que ça me suffisait. Si tu savais ce que je me trompais."


"Moi qui n'avait jamais eu dans ma vie, que des machines et la compagnie de la science, un nouveau monde s'est ouvert à moi. Et quel bonheur, tout ce que je souhaite désormais c'est que tu connaisses ça un jour. Rencontrer ta mère,  ça a changé ma vie, Skye."


"On s'est mariés assez vite, pourquoi attendre quand on est sûrs ?"


"Et après quelques années de mariage idylliques, c'est toi qui t'es annoncée. Nous faisions tous plein de projets pour toi, pour nous, nous t'attendions avec ferveur. Notre petit oiseau des îles, tu allais compléter notre bonheur !"


"T'avoir à mes côtés depuis vingt ans, Skye, c'est un cadeau que je savoure à chaque instant, mais je n'ai plus jamais été réellement heureux après avoir perdu Dorothy. Nous avions choisi ton prénom ensemble. Ou plutôt, elle avait choisi et j'avais donné ma bénédiction. Nous t'appellerions Skye, comme l'île écossaise sur laquelle ta maman était née. La suite, tu la connais, l'accouchement s'est mal passé, je suis rentré de l'hôpital seul avec toi."


"Tu as été ma bouée de sauvetage, ma petite chérie, ça je veux que tu le saches, ce n’est que grâce à toi que je ne me suis pas noyé dans mon chagrin. Mais je crois que j'ai un peu perdu la tête, je ne dormais plus, je n'acceptais pas ce qui était arrivé à Dorothy. Ce n'était pas possible, on pouvait forcément faire quelque chose. Pour m'occuper l'esprit, je passais mes journées au laboratoire, et mes nuits sur les appareils de la maison. C'est là que m'est venue une idée folle, j'allais ramener ta mère. J'étais le plus grand scientifique de mon époque, si quelqu'un pouvait pouvait manipuler les atomes et défier le cours de la vie, c'était moi. J'y ai passé des années, c'était devenu une idée fixe. Bébé, tu dormais à côté de mes machines, comme ça j'avais toujours l'oeil sur toi. Puis tu as commencé à grandir, à marcher, tu demandais plus d'attention que je ne pouvais t'en donner, parce que j'étais trop occupé à vouloir ressusciter ta maman. Toi,  tu semblais te contenter d’être toujours à côté de moi. Tu jouais par terre à côté de moi."


"Un jour, évidemment, mon ami et collègue Eugène a fini par comprendre. Il a essayé de me raisonner, j'allais passer à côté de ton enfance. Et puis franchement, pour Frankenstein, on avait déjà donné, ça n'avait pas été concluant. Je refusais de l'écouter, j'y étais presque, il ne manquait presque rien... Mais ce presque rien, c'était l'essentiel et je n'en venais pas à bout. Entre-temps la direction du laboratoire s'est emmêlée, elle a mis le nez dans mes fiches et a compris ce qui se tramait. Un scientifique qui se prend pour un tout-puissant, qui veut défier la vie et la mort, ça fait désordre… J'ai été congédié avec fracas, et Eugène m'a évité le passage pour l'hôpital psychiatrique. Il a aussi étouffé l’affaire tant bien que mal, ils sont peu à savoir exactement quelle expérience j’essayais de mener à bien. Mais depuis, je suis un paria, nous sommes des parias. Le savant fou de Willow Creek et sa fille aux cheveux turquoise."


"Tu as essayé de ressusciter Maman ?"
Je n'avais jamais trop réfléchi à ce qui avait dû être "l'expérience de trop", celle qui avait conduit le laboratoire à le licencier, mais je n'aurais jamais imaginé ça... Jouer avec la vie, ça parait complètement fou en effet, et pourtant... Je peux comprendre, je crois, la douleur qui l'a amené à faire ça, parce que je l'ai toujours connu avec. Cette lueur dans son regard, qui ne l'a jamais quitté, même lorsqu'on jouait ensemble et qu'il me semblait qu'on était si heureux.


Je me sens un peu désarçonnée.
"Et après, tu as tout laissé tomber ? Comme ça ?"
Ca ne colle pas avec le père que je connais. Arrêter en pleine lancée, tout ça parce qu'il n'avait plus de boulot... Avec toutes les machines qu'on avait à la maison...
"Non, évidemment que non. Simplement mes recherches étaient stériles, je n'ai jamais pu en venir à bout. Mais tu connais bien ton père, j'ai été plus loin. Puisque la science ne pouvait pas me ramener ma femme, je me suis tourné vers la magie."


La magie ? Non, là c'en est trop, il se fiche de moi. Comment un grand scientifique comme lui, peut-il prononcer le mot magie, sans sourciller ?
"Ca suffit, dis-moi la vérité maintenant !"
"Mais c'est la vérité ma chérie. J'ai été consulter le Sage de la magie indomptée. C'est lui qui finalement m'a fait renoncer. il m'a expliqué que mon projet était réalisable, mais qu'il avait un coût, et ce coût je n'étais pas prêt à le payer. Alors je suis revenu en arrière, et j'ai tenté d'oublier tout ça. Je me suis consacré à toi, à te regarder grandir et à essayer de t’entourer de l’amour dont j’étais encore capable. Mais je n'ai jamais réussi à faire mon deuil..."
"Enfin, la magie, ça n'existe pas, ce n'est que dans les contes qu'on raconte aux enfants. Abracadabra, un coup de baguette et tout s'arrange, tu ne vas pas me dire que tu as cru à ça !"
"Oh, c'est un peu plus compliqué que ça justement, on ne peut pas toujours tout arranger, mon histoire en est la preuve."
"Papa, la science ! Les atomes, les molécules, les éléments, rien ne se perd, tout se transforme... Ca, ça existe !"
"Tu ne devrais pas être si catégorique ma puce. Par contre, tu ferais bien de parler de tout ça avec ton amie Gemma."
Gemma ? Qu'est-ce qu'elle vient faire là-dedans, elle ?


J'ai fini par me calmer, ça ne vaut pas le coup de me fâcher avec Papa pour ça. Si ça lui fait du bien de croire en la magie... Il a tenu à rester jusqu'à ce que je m'endormes, comme lorsque j'étais une petite fille. Je me demande ce que j'aurais pu faire de plus à l'époque, si j'avais compris qu'il souffrait tant... Rien, à part l'aimer et le soutenir toujours, je crois que je ne peux rien faire. Il y a des solitudes qu’une fille ne peut combler.


Après ces révélations, la vie a continué, évidemment. Il y a un vieux qui a pris sa retraite au labo, ils ont engagé une nouvelle, Leila. Eh bien vous savez quoi ? On s'entend hyper bien ! J'ai enfin une alliée dans la place, yo man !


On est rentrées faire connaissance chez moi, et je l'ai prévenue de se méfier de Miss Pancakes et sa clique. Je crois qu'elle aime jouer aux échecs autant que moi. Est-ce que le temps ne s'éclaircirait pas au-dessus de ma tête ?


Je nous ai préparé une bonne petite salade maison pour le dîner, et la fille des voisins est venue nous rejoindre. Les gosses tournent souvent autour de chez moi, je crois qu'ils me trouvent marrante. Bah, tant que leurs parents ne leurs interdisent pas de me côtoyer, moi ça me va !


Quand je suis retournée au labo le lendemain, pas de trace de Leila, mais une autre petite nouvelle. J'ai discuté un peu avec elle, et puis je l'ai retrouvée en larmes, les autres l'avaient lynchée parce qu’on s’était parlé. Bon... on n'est pas sortis du sable ! J'ai dit à Aïko de faire profil bas pour le moment, et de ne pas se montrer avec moi. Après j'ai appelé Leila pour savoir pourquoi elle n'était pas là. La direction lui a apparemment demandé de poser une semaine de congés. Ca sent l'équipe qui se rebelle contre moi ça.


Ils pensent vraiment que je ne les entends pas avec leurs messes basses ? Qu'ils s'attaquent à moi, soit, mais que se soient les nouvelles qui paient les pots cassés, ça c'est non ! Elle n'est pas bientôt à la retraite la mère Pancakes, là ?


Je me suis fendue d'un petit coup de fil à Tonton Eugène, le pote de Papa qui bosse au conseil de géologie, il se trouve qu'il connaît bien notre patron. J'aime bien régler mes affaires moi-même en général, mais là ça dépasse les bornes des limites ! Bizarrement, trente minutes plus tard, Pancakes invitait Aïko à déjeuner avec le reste de l'équipe. Bon, c'est déjà ça. Moi, mon petit sandwich en discutant avec R2, je m'y suis faite depuis longtemps.