[SBS] Symbiose ⌊G2.10⌉ - En route pour Granite Falls ! [26.02.24]

- Hmh…

Un banc de parc. Il faisait doux, c’était le matin. Je sentais le monde tanguer autour de moi comme si j’étais dans un de ces manèges de fête foraine, sauf que clairement, c’était pas le cas.




J’ai rudement baillé et par la même occasion, j’ai pu constater que mon haleine ne sentait pas la rose, mais bon.

Je me demandai soudain comment j'avais atterris ici. L’angoisse commençait à faire vibrer mon intérieur et je craignais d’être en train de perdre la tête. Je ne me souvenais franchement de rien qui put m'indiquer que je m'étais égarée jusqu'à ce parc. J'étais dans mon lit, à la maison, et puis soudain... Ici. Mais non ! Une mémoire, ça ne s’égare tout de même pas juste comme ça, au petit bonheur la chance !





Je me suis levée, tout étourdie, et j’ai fait quelques pas en me demandant par quoi commencer. Mon cellulaire avait disparu et peut-être même avais-je été détroussée, car je n’avais plus les clés de ma maison ni de la voiture. Bon sang, ce serait le pire des cauchemars !

- Cher univers, ne me fait pas le coup du karma, s’il-te-plaît, pas maintenant ! Merci !

Je regardai à droite, à gauche pour m’assurer que personne ne m’avait surpris en train de parler toute seule, puis rassurée, je me dirigeai vers la maison que j’apercevais non loin de là. J’avais apparemment atterri sur le bord d’un lac, ou d’une rivière peut-être, avec un passage piéton et peut-être même pour les cyclistes, mais à cette heure matinale, il ne semblait y avoir personne.





Je fus assez surprise lorsque j’arrivai pour cogner à la porte de la maison. Sa résidente en sortit effectivement avant même que j’eus cogné pour venir se présenter.

- Bonjour, bonjour ! Je m’appelle Emily, et je dois dire que j’avais hâte que vous vous réveilliez ! Quel bonheur de vous accueillir au sein de Symbiose !





Symbiose ? Mais de quoi parlait-elle ?

- Hum… Bonjour, je… En fait, je ne comprends pas trop… Vous saviez que je dormais là, dans le parc ? J’ai dû avoir l’air d’une itinérante, mais vous savez, j’ai un logis et tout, simplement… Je suis un peu perdue, je ne sais pas trop où je suis ?

- Ne vous en faites pas, Monica ! C’est un peu casse-pieds, ces bugs, mais il n’y a rien qui arrive pour rien !





Monica. Elle connaissait mon nom ? Mais que se passait-il donc ?

- Attendez… D’où me connaissez-vous ?

- Je pense qu’il y a dû y avoir un certain grillage au moment de votre arrivée… Vous ne vous souvenez de rien ? Est-ce que vous vous rappelez de… Bah de vous-même ?

- Bien sûr ! Je m’appelle Monica Wright, j’habite Sunset Valley. Je suis une jeune adulte, et nous sommes dans la 3e ère.

J’avais répondu ce qu’on m’aurait demandé dans un hôpital, mais je n’étais pas certaine que ce fût ce qu’elle s’attendait à entendre, vu son froncement de sourcils.





- Emily, t’as vu mon appareil phot… Aaaaah ! C’est pas Monica ? Elle est réveillée ? Mais pourquoi tu m’as rien dit ! Salut ! Enchantée ! Je suis Callia Mayebe, et je suis super excitée d’être ton guide, c’est genre ma première fois de toute ma vie !

- Arrête un peu, Callia, tu es trop intense, des fois, soupira Emily dans un murmure.

Callia souriait dans une expression crispée, les yeux écarquillés comme s’ils allaient exploser. C’était vrai qu’elle n’était pas rassurante.

- Mais la chanson ? siffla-t-elle entre ses dents serrées.

Emily renfonça ses lunettes sur son nez en baissant les yeux dans un soupir. Puis elle releva la tête et sourit férocement en s’exclamant :

- Tu as raison ! Quel meilleur moyen d’accueillir notre nouvelle participante que d’entonner LE chant de gloire !





Et elles entreprirent de chantonner un air au rythme des claquements de mains de Callia, sans toutefois parvenir à être en accord. Emily chanta faux et Callia ne fit que marmonner les paroles qu’elle ne connaissait apparemment pas, tout en me fixant intensivement sans cligner une seule fois des yeux. Apparemment, j’étais supposé sourire, voir applaudir.

Je fournis un effort et étampai un sourire dans ma face. Les femmes parurent satisfaites tant de leur performance que de mon expression, et proposèrent que nous rentrions pour qu’elles m’en disent plus sur tout ce que j’avais oublié.





Emily me tendit un téléphone cellulaire très moderne, d’une marque que je ne reconnaissais pas. Elle m’apprit qu’il contenait toutes les informations utiles à l’utilisateur de Symbiose et que j’y recevrais mes notifications pertinentes. Allez savoir ce que cela signifiait.

J’appris que je ne me trouvais plus dans la 3e ère, mais bien dans la 4ème. Je ne sais comment, j’avais été transportée dans le nouveau monde, en pleine expansion, celui qui était sur toutes les langues à Sunset Valley mais qui relevait plus d’une légende urbaine et d’un mythe que d’un fait. Eh bien, j’y étais bel et bien. Une technologie de pointe régissait le monde et permettait au projet Symbiose d’étudier chaque Sims habitants la 4ème ère sans cependant envahir leur vie.

C’était du moins ainsi que l’apportaient Emily et Callia. Moi, de ce que j’entendais, les gens qui étaient emmenés dans ce nouveau monde se voyaient restreints dans leurs libertés, forcés d’atteindre des objectifs de vie pour avancer, sans pouvoir choisir lesquels.

- Et si je ne suis pas en accord avec un objectif, je fais quoi ?

- Mais voyons, lequel ne te conviendrait pas ?

- Bah…





- La plante Vache ? Dans mon univers à moi, il s’agit d’une plante carnivore et très dangereuse, alors je suis désolé mais il est hors de question que j’y touche !

Emily sourit, amusée.

- Tu sais, tu as passé un entretien dans lequel tous les objectifs t’ont été répertoriés, même ceux des générations futures, alors tu savais dans quoi tu t’embarquais, lorsque tu as signé, même si là maintenant, tu ne te souviens pas !

J’étais perplexe. J’avais signé une entente, et apparemment je ne pouvais même pas retourner en arrière. Non seulement ça, mais je devais fonder une famille qui porterait mon nom sur plusieurs générations et aurait à subir ma malédiction tout du long. En quoi avais-je considéré que c’était avantageux pour quiconque ?

- Il y a des conditions à concevoir ! Je n’y crois pas, vous allez me dire que non seulement je suis forcée de concevoir, mais qu’en plus je ne peux pas choisir le lieu où ça se produira ?

Callia gloussa en rougissant.





- Tu vois, en fait, les objectifs que tu as à remplir, ils te font gagner des récompenses, aussi ! Certaines plus importantes que d’autres, suivant l’ampleur de la tâche accomplie, mais toutes très amusantes, tu verras ! Symbiose a été conçue pour rendre le Sim moyen plus heureux et épanoui que jamais. Pour lui permettre de développer ses capacités au maximum et transmettre cette génétique améliorer à ses descendants, et que le monde devienne un endroit meilleur où vivre, étape par étape… Ces restrictions, tant celles de conception que celles alimentaires – que tu découvriras si tu continues ta lecture du guide -, sont conçues pour agrémenter ton séjour et te permettre de développer au mieux ton potentiel. Et les récompenses sont, disons, un petit plus pour te féliciter dans tes réussites !

Wow. Je ne m’attendais pas à ce que son petit discours m’interpelle autant. C’était comme si au fond de moi, je comprenais tout à fait où elle voulait en venir et qu’une part de ma résistance cédait. Était-ce la voix fluette de la jeune femme qui m’avait envoûtée un instant ou avais-je toujours su quelque part que ce monde fonctionnait ainsi ?

En tout cas, j’étais un peu plus rassurée.

Jusqu’à ce que Callia poursuive, d’une voix plus hésitante cette fois :

- Ah, hum, au fait… Oui, il y a eu un énorme bug lorsque tu as été transférée et… En fait, tu es considérée sans domicile fixe… Et je peux te prêter quelques simflouz, mais tu n’en possèdes pas non plus… Désolé !





Pas de maison ? Pas de voiture ? Pas de sous ?

Déjà que j’étais isolée, perdue, confuse ! A présent, voilà que j’étais terrifiée. Et si le pickpocket venait me dérober mon cellulaire ? Ou que je mourrais de faim ? De froid ? Est-ce qu’il y avait même des températures, en ce nouveau monde ?

J’allais vraiment entamer ma nouvelle vie ainsi ?

Ça doit être le karma, songeai-je avec désespoir.




Quelques heures plus tard, j’avais marché jusqu’à un petit parc de la ville, que j’avais appris s’appelait Newcrest. Le petit parc était joyeusement conquis par les cris d’enfants qui s’amusaient dans la cage à poule et l’échelle horizontale. Des fontaines crachaient un jet silencieux et hypnotisant au passage des piétons. J’aurais voulu que ma famille, mes amis – le voisin avec qui je m’engueulais toujours, même ! -, soient là pour me supporter dans ce terrible moment de confusion.

- Tiens ! Une petite nouvelle ? Ça n’a pas l’air d’aller.

C’était une constatation, pas une question. Aussi ne répondis-je rien. Je tournai la tête vers le jeune homme qui m’avait parlé et hochai la tête pour le saluer, sans éprouver la force de lui renvoyer un sourire.




Il prit place près de moi et commença à me parler de lui, qu’il était arrivé dans la 4e ère depuis un mois et qu’il était devenu humoriste, son métier de rêve. Il avoua qu’il n’était pas très bon comédien mais qu’il s’évertuait à s’améliorer toujours plus. Voulais-je entendre une blague ?

- Qu’est-ce qu’une chauve-souris avec des cheveux ? Hein, hein ?

J’ai haussé les épaules, je n’étais pas trop d’humeur à rigoler.

- Une souris ! Ahah !

Je me détendis. C’était amusant. J’aurais ris normalement, mais j’étais crevée.




- Je m’appelle Johnny, Johnny Zest. Avant, on m’appelait autrement, mais depuis que je suis ici, j’ai décidé que je porterais ce nom. Et toi, c’est quoi ?

- Monica Wright. J’ai été enchantée de te rencontrer, Johnny, mais je dois y aller.

J’avais la vessie qui allait éclater, et je voyais des toilettes non loin de là. Le jeune homme me salua chaudement et s’en alla tandis que je me dirigeais vers la salle de bain.




Je reçu soudain une notification de la part de Symbiose et je ne pouvais simplement pas m’empêcher de m’arrêter pour la lire.

« Chère participante,

Bienvenue à Newcrest, votre nouvelle demeure ! Nous espérons que la maison vous convient et que le petit montant rondouillet que nous vous avons octrôyez vous permettra de vous sentir bien confortable dans votre nouvelle vie qui commence. Si vous éprouvez le moindre souci, n’hésitez pas à faire appel au service des guides. Vous avez été jumelée à Emily et Callia, nos deux spécialistes de Newcrest. Elles sauront répondre à la moindre de vos questions.

Bon séjour, bonne vie !

- L’équipe de Symbiose »

Je n’en croyais pas mes yeux ! Le culot ! Un domicile, une somme rondouillette ? Mon œil, oui ! Je ne possédais que mes vêtements et mon cellulaire, rien d’autre !

- Ça va ? Tu as l’air un peu… triste ?

- Pas triste, volcanique plutôt, perplexe, aussi, et complètement déboussolée… J’y crois pas, les idiots !

Je soupirai et clignai des yeux en réalisant que je n’avais aucune idée d’à qui je venais de dire cela. Je levai la tête et découvris devant moi un beau jeune homme. Très beau, même. Mon cœur pompa fort et soudain je virai au rouge.





- Je suis désolé ! Je ne voulais pas me plaindre !

Le jeune homme rit.

- Ça va, pas de soucis ! Je pense que tu étais tellement absorbée par ce que tu faisais que tu n’as même pas vu que j’étais là, en fait !

En plein dans le mile. Je rougis plus encore.

- Je m’appelle Monica, répondis-je comme pour calmer la tempête de mon cœur.

- Et moi, Travis. Enchantée, Monica.

L’entendre prononcer mon nom n’aidait pas petit idiot de cœur qui avait décidé d’avoir le béguin pour le beau gosse.

- J-Je suis désolé, hum, Travis… Mais je dois aller… Chez moi !

J’avais failli m’échapper et lui déballer que je devais aller au petit coin !

- Y a pas de soucis, j’espère qu’on se reverra bientôt !

Ah bon ? Bien moi aussi, alors ! Mais bon, on se calme et on le salut posément, puis on s’en va la tête haute, en respirant calmement. Tout va bien, ce n’est qu’un petit béguin.




Et comme j’allais exploser de ma vessie, je manquai me faire dessus lorsqu’une jeune femme me surprit en criant à mes oreilles.

- C’est pas vrai ! Une petite nouvelle !

Je serrai les cuisses et me forçai à sourire en stoppant net.

- Bonjour ! soufflai-je.




Summer, comme Johnny avant elle, se présenta de long en large. Elle était cuisinière en voie d’obtenir une promotion, vivait avec deux colocs géniaux, ses meilleurs amis, mais vraiment, et adorait jouer aux cartes. Et moi ?

Ah, pas encore…

Je lui donnai mon nom, après quoi, je ne sais pas ce qui me prit mais je lui déballai tout ce qui m’était arrivé depuis mon arrivée à Newcrest. Ma perte de mémoire, ma rencontre avec les guides, le fait que j’étais sans domicile, sans argent…





- Mais viens chez moi ! Tu dormiras sur le canapé, je suis sûre que ça ne dérangera pas à mes colocs et puis ça te fera quelque part où vivre le temps de te trouver une maison ! Ou de t’en bâtir une, pourquoi pas !

M’en bâtir une… J’avais vaguement lu à ce sujet, et à propos de la compétence bricolage… Mais squatter chez une inconnue que je venais de rencontrer ?

- Je ne sais pas trop, Summer… Sans vouloir te vexer, on ne se connait pas vraiment, tu sais…




- Allez, dis oui ! Passe la nuit et tu verras ! Je le VOIS que tu vas te pisser dessus si on continue de juste jaser dans le parc comme ça ! Viens chez moi, j’ai à manger et une toilette propre !

Je souris. J’aimais bien Summer et sa spontanéité, elle me rappelait ma petite sœur, Sofia. Je me demandais si je la reverrais un jour… Mais dans le ici et maintenant, je hochai vivement de la tête à la proposition de Summer et j’appris un peu à la dure que les voitures, ici, n’existaient pas. Que nous devions nous « téléporter » d’une ville à l’autre. C’était à la fois sympa, pratique et nullissime.





Arrivés chez Summer, j’ai couru aux toilettes.

- A ta gauche, tout au fond ! criait Summer tandis que je me dirigeais instinctivement vers l’objet de mes rêves.

Une fois soulagée, je revins vers la jeune femme et la remerciai vivement de m’accueillir chez elle.

- J’espère que ça ne dérangera pas tes colocs !

- Qu’est-ce qui ne nous dérangera pas ? fit une voix derrière nous.

Je me tournai pour découvrir mon beau Travis dans le couloir derrière moi. Ma mâchoire se décrocha sous l’effet de la surprise. Le coloc numéro un de Summer était donc mon béguin monumental ! Hum, étais-je à l’aise de dormir sur leur canapé ? Je rougis férocement.

- Rebonjour, me salua-t-il en souriant de toutes ses dents, vivement amusé par mes rougissements incessants.

Je me retournai vers Summer et demandai si elle avait de l’eau, que je me sentais un peu étourdie et que je devais être déshydratée.





L’émotion passée, je me retrouvai en compagnie de Travis et Summer, et je me composai du mieux que je le pouvais pour ne rien laisser paraître de l’état dans lequel me mettait le jeune homme. Nous discutâmes du 3e ère, d’où nous venions tous à la base, et ils m’apprirent que tous deux venaient de Riverview. Travis et Summer étaient cousins et avaient été sélectionnés sans savoir que l’un et l’autre avaient passé l’entretien ; lorsqu’ils étaient arrivés, ils vivaient dans des maisons séparées, mais ils avaient jumelé leurs finances et s’étaient installés ensemble, puis était arrivée Liberty, qui venait de Shang Simla et était écrivaine. Travis, lui, travaillait comme technicien en informatique chez TechGuru.

Je leur parlai de ma famille ; ma mère, Catrina, était décédée lorsque j’étais petite et ma sœur et moi avions été élevés par mon père, Robert, qui était directeur de l’hôpital de Sunset Valley. J’avais grandi dans une belle maison en bordure de l’eau et lorsque j’avais été en âge de déménager, c’était de mes propres finances que j’avais acheté ma première maison. J’étais une artiste indépendante et peignais depuis ma plus tendre enfance, alors tant la voiture que la maison avaient été financées par mes toiles. J’espérais que de telles choses étaient possibles ici aussi.

- Bien sûr ! Tu peux devenir peintre, et tu auras le choix de deux branches dans le métier, ou tu peux devenir peintre indépendante, et alors tu auras toute liberté d’action, c’est à toi de voir, mais l’emploi stable procure des récompenses, des fois elles sont plutôt sympa, tu as un manuel à ce sujet sur le net, si ça t’intéresse, m’apprit Summer.

Travis gardait principalement le silence, l’air d’apprécier simplement la compagnie et le ton léger de la conversation. J’avais l’impression que son visage en exprimait plus que tous les mots qu’il aurait pu prononcer à ce moment. Je sentais que je lisais en lui et qu’il avait cette ouverture avec moi aussi, que nous étions en quelque sorte connectés. Avais-je déjà ressenti quelque chose de si fort pour qui que ce soit ? Et si rapidement, d’ailleurs ?





Summer me prêta la moitié de son lit pour la nuit, préférant que j’aie droit à un bon matelas qu’au stupide canapé. J’étais à l’aise avec la jeune femme, que je considérais comme ma meilleure amie en ce monde nouveau. Je lui avouai mes craintes et incertitudes face à ce projet que je ne comprenais pas, et elle me conseilla de dormir, tout simplement, et que demain, avec l’énergie renouvelée, j’aurais peut-être une vision des choses plus optimiste. Elle était sage.





Puis, sous le coup d’une impulsion, je soufflai :

- Summer… Je pense que… Je crois que j’ai des sentiments pour Travis… C’est flou, c’est… Intense… Mais c’est flou…

La jeune femme soupira et son regard demeura fixe un moment. Elle réfléchissait apparemment au meilleur moyen de me dire ce qu’elle en pensait.

- Je veux que Travis soit heureux. Je ne te connais pas beaucoup, mais je pense que vous seriez beaux ensemble… Si tu cherchais mon approbation à le draguer, tu n’en as pas besoin, vous faites ce que vous voulez, mais disons que je ne serais pas contre l’idée de vous voir flirter, tous les deux. Ça fait un an que nous sommes là et Travis n’a jamais souris autant en une soirée que là, ce soir. Et c’est pas comme si je ne lui avais pas présenté nombre de belles filles ! Non, il a craqué pour toi.

Mon cœur battait la chamade. J’avais envie d’exploser de joie. Ces mots qui venaient confirmer que Travis avait des sentiments pour moi me comblaient d’un bonheur inattendu, et c’est sur ce sentiment que je tentai de m’endormir, bien que très, très, très difficilement.

Le lendemain de mon squattage chez le trio d'amis, je rencontrai la fameuse Liberty. Elle me raconta qu’elle écrivait une série sur ses amants, qui se comptaient pour le moment au nombre de cinq. Elle était super passionnée de me parler de ses conquêtes, mais j’écoutais avec malaise car parmi celles-ci, des hommes mariés. Je comprenais qu’elle soit l’amie de Summer et Travis depuis longtemps, mais cet aspect d’elle ne m’intéressait guère, aussi changeai-je de sujet. Je lui confiai que j’avais appris le karaté à Shimla Shang, étant jeune, et elle se refroidit. Apparemment, elle ne souhaitait pas évoquer sa vie dans la 3e ère.



Avant de partir, et parce que je n’avais pas l’intention de revenir squatter ce soir ni les suivants, je demandai un selfie avec chacun de mes trois nouveaux amis. J’avais hâte de les retrouver, mais j’espérais que ce serait dans de meilleures circonstances que d’être forcée de crécher chez eux.



Liberty me conseilla d’aller faire un tour au petit jardin d’à côté. Je pourrais manger ce que je récolterais, en revendre une quantité et en replanter une autre, ce qui serait bien à mon avantage pour me faire un fond de poche sans crever de faim. Seul hic : je détestais jardiner. Beurk, les insectes et beurk, les racines et la terre ! C’est donc avec un petit haut-le-cœur que je récoltai des fraises, des pommes de terre, des jacinthes et des pommes. Au moins, les revendre me rapporta effectivement quelques simflouz qui furent bienvenus.

Puis, je reçus un message texte d’Emily qui me demandait si je serais disponible de la rejoindre à Newcrest, à une location où je ne m’étais pas rendu encore, qui s’appelait : « Studio Art’Zic »




Je la rejoignis donc à l’entrée des lieux, où elle m’accueillit avec l’excitation d’une puce.

- Ah ! Te voilà ! Bon, écoute. J’ai une toute petite surprise pour toi, mais je suis sûre que tu vas apprécier, et même plus, que tu vas adorer !

Elle avait toute mon attention. Je voyais bien par les fenêtres du bâtiment que l’endroit semblait agréable et paisible. Que pouvait-il me réserver de si fabuleux ?




- Imagine-toi donc que nous avons été capable de communiquer avec Symbiose vis-à-vis de ton problème de logement. Bon, ils n’ont pas réglé la situation, ils nous ont dit que maintenant que tu étais là, il n’y avait pas grand-chose à faire, mais en contrepartie, ils ont suggéré cet endroit pour que tu puisses peindre ! Tu l’auras deviné, il s’agit d’un studio d’art ! Ici, tu pourras user des installations à ta guise, et même manger sans risquer de contrevenir à tes restrictions alimentaires !




Je compris soudain. Peindre me permettrait de m’amuser, oui, mais surtout de me lancer dans la carrière désignée, et d’après commencer à gagner suffisamment pour me bâtir un petit chez moi !

- Mais c’est génial ! m’exclamai-je, enthousiaste soudain.
- Tu vois ! En plus, il y a un établi d’ébénisterie pour te permettre de te familiariser avec le bricolage !

Tout commençait à prendre forme, tout irait bien.




Le studio comprenait en fait trois sections découpées par un café : le studio de peintre, celui de musique et un coin librairie avec un ordinateur pour les férues de lecture et d’écriture – ou pour se détendre simplement.




- Woah, j’adore ces chevalets ! Ils sont de qualité !

- Ce sont des récompenses de carrière ; ici, ils sont exposés et accessibles pour la clientèle, mais chez toi, tu devras les débloquer pour y avoir accès. Vois ça un peu comme une vitrine qui te permet de voir un peu comment t’orienter pour le futur ! As-tu songer à un métier ?

- J’ai fouillé un peu le manuel du travailleur et je pense que je viserais de devenir mécène, justement pour les récompenses. En tout cas, je deviendrai peintre, très certainement. C’est mon aspiration de vie, après tout !

Tout en parlant, je chatouillais une toile du bout du pinceau, un petit sourire aux lèvres. Je me sentais enfin un repère dans ce monde de confusion.




- Ici, il y a un micro-onde à ta disposition. J’ai retiré la cuisinière et le barbecue avant de te présenter les lieux, car je ne sais pas si tu as lu à ce sujet, mais tu as cette restriction alimentaire de ne jamais pouvoir te servir de ces équipements.

- Je sais. Je peux manger les plats du micro-onde, me faire livrer des plats, engager un traiteur et chiper des repas chez les autres s’ils ont cuisiné eux-mêmes, mais je ne peux pas me faire à manger. Sincèrement, ça ne me dérange pas, c’est juste que financièrement, là, je n’ai pas les moyens de rien.

- C’est pour ça que le studio est idéal, en ce moment. Bien sûr, tu devras trouver quelque part où dormir, mais pour tout le reste, viens ici en attendant d’avoir ce qu’il faut chez toi !

Je m’étais fait chauffer des flocons d’avoine entre-temps et dégustais en soufflant férocement sur le plat pour éviter de me brûler la langue.

- Tu devrais t’inscrire pour ton métier, tu sais. Ça te ferait une chose de moins à faire !





J’appelai l’agence artistique et leur demandai de m’inscrire parmi les peintres du métier. Parfait, ils cherchaient justement ! C’était si facile ? J’étais engagée ! Woah.

- Bien ! s’exclama Emily. Maintenant, quand tu as jeté un coup d’œil à ta liste d’objectifs, as-tu eu des interrogations ?





- Bah, oui ! Presque tout était confus ! La clairière magique ? La grotte oubliée ? Le clown tragique, c’est un mythe du 2e ère, non ? La plante Vache, enfin… Oui, beaucoup d’interrogations !

- Je suis là pour aider, tout comme Callia, et si tu as des questions, nous aurons le droit de te donner chacun un indice sur tes objectifs.

Je comprenais qu’elles ne puissent pas me souffler les réponses, c’était évident.

- La clairière magique ? demandai-je à demi-mot.

- Petit indice, tu la trouveras à Willow Creek.

Ça n’en disait pas beaucoup, mais il faudrait que je m’en contente. Donc, j’étais vouée à retourner chez mes amis dans les jours prochains… Je décidai de passer la nuit au studio, à peindre le plus possible pour m’améliorer tant et si bien que j’obtiendrais certainement une promotion très rapidement. Du moins, l’espérais-je. J’étais peut-être trop ambitieuse.





Mais quelle ne fut pas ma surprise lorsque je rentrai du boulot, le lendemain, déjà promue ! Si vite ?! J’étais ébahie, et totalement crevée, mais heureuse d’avoir quelques sous.




Pourtant, je n’avais certainement pas gagné assez, ni avec mon salaire, ni avec mes récoltes. En fait, je ne fus capable de bâtir qu’une entrée avec la porte et un plancher. La pièce n’était même pas fermée ! Au moins, j’avais la lampe en récompense de ma promotion, mais j’avoue que j’étais un peu déçue. Je pense que je n’avais pas compris la difficulté qui m’attendait à construire moi-même ma petite maison.




Je retournai au logis de mes amis pour leur demander si je pouvais passer la nuit, bien qu’à contre-cœur car je n’avais pas envisagé les choses ainsi. Je montrai même les photos des rénovations de mon chez-moi à Travis lorsque je croisai celui-ci à l’entrée du logement, comme si je cherchais à me justifier à quelque part.

- Mais ça avance super bien, en fait !

- Tu trouves ? Peut-être que c’est moi qui suis impatiente, mais j’aimerais avoir déjà des murs fermés, au moins !

- Ce bug qui t’a affecté, c’est pas cool. Certains sont de véritables plaies, d’autres nous permettent de petits passe-passe. Une fois, j’ai gagné 3 000$ rien qu’en le demandant, parce que le système avait buggé. Mais juste avant que tu arrives, tout le monde était à cran et se disputait sans cesse à cause d’un bug majeur, c’était vraiment terrible, je t’assure. Et là, toi tu débarques, tu n’as pas un sou, ça doit être difficile à vivre !

- Ouais… Je ne peux pas m’imaginer ce que ça devait être de se chicaner constamment, Summer m’en a parlé un peu, ça l’a vraiment secoué ! Mais en tout cas, je ne cracherais pas sur 3 000$ gratis ! plasantai-je pour alléger la discussion.




Il pointa mon uniforme du doigt et je souris d’un air gêné.

- Ah ! Oui ! J’ai été promue dès le premier jour, et j’ai eu un uniforme pour le coup !

- Félicitation pour ta promotion, alors !





Lentement, il ouvrit les bras comme pour m’inviter à une étreinte, mais c’est lui qui s’avança le premier et qui m’enlaça chaudement. Mon esprit tournait à mille à l’heure, au rythme de mon cœur probablement, et je me demandais si Travis pouvait sentir le tourbillon chaud-bouillant qu’il venait de déclencher en moi.





Summer ne rentrerait de travailler que plus tard, et Liberty était chez son amant du moment. J’étais seule avec Travis, mais je choisis de ne rien faire de cette information. Je ne souhaitais pas que les choses se fassent trop rapidement, même si je sentais que le courant passait très bien entre nous.

Avant que nous ne nous quittions, je lui avais demandé s’il avait la moindre idée où se trouvait la clairière magique. Il avait froncé les sourcils et promis de se renseigner. En tant que geek, m’apprenait-il, il adorait se renseigner sur ces choses mystérieuses sur le net. Je le remerciai de son soutien, et lui promis mon aide s’il avait de la difficulté avec un de ses objectifs.

Je m’endormis ce soir-là bien plus motivé que je ne l’étais en arrivant la veille, et j’étais reconnaissante d’avoir rencontré de si bons amis si tôt dans mon aventure qui ne faisait que commencer.





Au petit matin, je me rendis au studio Art’Zic et me préparai un plateau-repas qui goûtait le carton malheureusement. Ce n’était pas le plus fameux repas que je mangeais depuis mon arrivée. Summer avait préparé un déjeuner de rois, le matin de mon premier réveil, et je m’en rappelais en salivant.





Je m’aventurai à bricoler un bloc de couteaux, avec beaucoup de maladresse et malgré tout, bien du plaisir. Le bois me résistait et forçait mes muscles à des mouvements inhabituels et douloureux, et je ne cessais de me couper ou de me marteler les doigts, mais au moins, je parvins à un résultat quasiment satisfaisant à la fin. Juste à temps car j’étais en retard pour le boulot !





C’est deux jours plus tard que j’eus ma seconde promotion. Yay ! J’avais pu planter des fraises à la maison, malgré mes réticences, et récolter des mufliers, creuser le sol aussi à la recherche de trésors, car malgré mon dédain pour ces activités, j’y étais bien forcée, et grâce à cela et à mon salaire, j’avais à présent une pièce fermée – vide, mais fermée -, et une poubelle. J’étais de plus en plus fière de moi, malgré mes petits pas de pingouin.

Soudain, je reçus un message texte de Travis. Il avait trouvé l’entrée de la clairière magique et suggérait que nous nous y retrouvions.





Je le trouvai devant un arbre majestueux, pas loin de chez lui.

- C’était là tout ce temps et je ne m’en étais jamais rendu compte, tu imagines ? s’exclama-t-il lorsque j’arrivai à sa hauteur.

L’arbre veineux pulsait comme au rythme d’un cœur, et scintillait en émettant un doux tintement. Ses compagnons luisants, champignons et fleurs, émettaient de vives couleurs dans le noir de la nuit tombante.

- C’est magnifique, soufflai-je en observant la majesté de l’énorme tronc.





Soudain, Travis me serra fort contre lui. Il était vraisemblablement très ému, et son rapide souffle m’indiquait qu’il vivait une forte émotion. Laquelle exactement ? J’avais l’impression d’un mélange d’émerveillement et d’enivrement. Je ressentais quelque chose de semblable, pour tout dire.

- Monica…

Mon cœur défaillit et je sentis mes jambes ramollir.

Nous restâmes là, serrés l’un contre l’autre à ne rien dire, à simplement apprécier notre symbiose, notre parfaite harmonie, sans chercher à aller plus loin, ni à se séparer. Le temps passa et un vent silencieux se leva, et c’est dans un calme brouillard mental que nous rentrâmes chez Travis, main dans la main, puis que je rejoignis mon canapé tandis qu’il se dirigeait vers sa chambre en silence.

Au moment de franchir le portail de sa chambre, il se tourna vers moi et sourit dans le noir. Je lui souris en retour puis fermai les yeux sans rien perdre de mon sourire.

Quelques jours passèrent et je m’isolai quelques peu. J’avais accumulé les sous nécessaires pour me procurer un lit, et grâce à mes promotions, j’avais à présent des croquis et de la lumière dans mon petit cube.

Un jour que justement, je parcourais le catalogue des meubles, je suis tombée sur le tableau du clown tragique. J’ai songé que de toute évidence, il y avait un lien là avec l’objectif que j’avais à accomplir, et je me le suis procuré, bien que j’aurais certainement pu faire de meilleurs achats. Ma première récompense m’attendait, et j’étais excitée de découvrir ce qui en était !

Je contemplais donc le tableau lorsque j’ai été envahi d’un lourd sentiment de tristesse. Je ne savais pas pourquoi ce chagrin immense, mais en vrai, je n’avais plus qu’une envie, peindre une toile triste. Si j’avais été au studio à ce moment-là, j’aurais sauté sur l’occasion. J’avais déjà conçu plusieurs toiles confiantes et enjôleuses, mais jamais rien de triste, même pas lors de mon arrivée ! J’avais tant et si bien progressé dans mon aspiration de peintre que j’avais même su me procurer la récompense de « Visionnaire » et j’attendais avec impatience de peindre mon premier chef-d’œuvre.





J’étais donc plus triste que jamais depuis mon arrivée, lorsque soudain est apparu un véritable clown tragique dans le portique. Se présentant tout bas, dans un soupir désespéré, il pénétra ma petite cabane sans plus de manières. Stupéfaite, je restai figée à ne pas savoir que faire lorsque Travis, héro de la situation, arriva quelques instants plus tard et interrompit les gémissements du clown qui « s’observait » dans le tableau à coups de pleurs angoissants.

- Hum, je peux savoir ce qui se passe ? demanda-t-il, presque agressivement.

Le beau Travis qui se faisait protecteur, j’aimais bien.





Mais il se composa, réalisant que certainement, je n’étais pas en danger avec ce piètre personnage qui ne faisait que gémir et faire des grimaces, et nous nous assîmes pour intervenir envers l’homme tristement vêtu.

- Monsieur, savez-vous que vous venez de pénétrer une résidence privée ?

Le clown répondit d’une voix lasse :

- Mais j’ai été appelé ! Je serais encore au lit, à rêver de la beauté de Chanel, s’il n’en avait été autrement.

Travis se tourna vers moi et me demanda tout bas pourquoi j’avais appelé ce personnage, mais je lui assurai que je n’en avais rien fait et que cependant, il s’agissait d’un objectif de vie et que j’étais presque persuadé qu’en réalité, le clown était une effigie connue à l’origine dans la 2e ère.




Nous nous mîmes à faire des recherches intensives sur le personnage, sous son regard las. Puis nous tombâmes sur ce que nous cherchions et découvrîmes qu’en réalité, le clown tragique était une malédiction qui venait du costume. Quiconque le revêtait devenait d’une tristesse intolérable, pour cette personne et ceux qui l’entouraient. Certains devenaient même absolument obsédés par le clown et se mettaient à le peindre et le sculpter à répétition.

Travis entreprit de rapporter ces informations à l’homme, car peut-être n’était-il pas au courant qu’il lui suffisait de retirer le costume pour redevenir heureux.





- Je sais, et je le ferai ! répondit-il vivement en esquissant un sourire. Cependant, madame a contemplé mon portrait et m’a ainsi invoqué, et d’ailleurs, félicitation, vous venez de débloquer votre première collection, m’assure-t-on dans mes notifications. Je suis mandaté de vous informer qu’à partir de maintenant, vos fêtes seront agrémentées de paillettes et de costumes farfelues, car vous passez de la version simple de Symbiose à sa version « Deluxe », qui comprend un tas de truc rigolo pour parfaire votre expérience ! Bravo, bravo !

Sur ces mots, le clown redevint tristounet et prit la porte sans attendre de réponse. Je demeurai silencieuse, ne sachant trop que dire, puis tant moi que Travis alla jeter un œil à cette fameuse collection « Deluxe ». J’avais le droit de montrer mes collections à qui je voulais, et même de donner des articles à mes amis, mais seulement ceux que je pouvais transporter dans mes poches et les tenues vestimentaires.

- C’est amusant ! rit Travis lorsque nous revint de notre exploration. Des fêtes costumées et des habits de clown – mais pas nécessairement tristes, ceux-là !

- Tu trouves ? Je suis mitigée, on m’a dit que les collections étaient personnalisées et je ne vois pas en quoi ça vient me rejoindre, toutes ces paillettes et ces costumes…

- Imagine un anniversaire où je me déguise en clown et raconte des blagues à gogo ! Ça serait hilarant, non ?
J’éclatai de rire. En effet, tout à fait hilarant, mais le plus drôle était de l’entendre s’extasier à ce sujet comme s’il avait toujours été un pitre de première classe alors que du peu que je connaissais de lui, il était surtout calme et posé. Je me demandais tout ce que j’avais encore à découvrir à son sujet.





Si Travis était venu chez moi ce jour-là, ce n’était pas pour rien. Nous avions prévu de nous rendre à l’arbre majestueux une fois la nuit tombée. Sur place, nous chuchotions comme des brigands, en pouffant de temps à autre, excités par la nature secrète de notre expédition.

- Selon moi, tu dois l’arroser, me souffla-t-il en souriant.

- Ah d’accord ! Ça fait du sens !





J’arrosai l’arbre à plusieurs reprises tandis que Travis m’entretenait sur tout ce qu’il pensait que nous découvririons de l’autre côté du tronc magique. Je rapportai à Travis, comme hypnotisée par la beauté de l’arbre, qu’il avait de si belles feuilles, de si belles racines…




Et puis soudain, le tronc s’ouvrit en grondant légèrement, laissant naître un portail à la place du gigantesque tronc qui se tenait là un instant plus tôt.

- Écho ! Écho ! criai-je pour chasser la petite terreur qui me tenaillait les tripes en pénétrant tête première dans le tunnel.





Mais après quelques détours et chemins brumeux, nous débouchâmes sur une prairie lumineuse et enchantée qui s’avérait des plus ravissantes. Je n’avais, en fait, jamais rien vu d’aussi beau de toute ma vie.




Évidemment, l’émotion était la même que l’autre jour, mais cette fois bien plus importante et fébrile. L’émerveillement et l’enivrement me poussèrent dans les bras de Travis, et je ne sais ce qui me retint de l’embrasser là, maintenant, mais je sus me contenir. J’avais en tête l’idée fixe qu’il me fallait attendre un premier rendez-vous avant de passer aux choses sérieuses, même si mon instinct me dictait que tout de Travis me plaisait à la folie. Je pense que si je n’avais pas écouté mon côté rationnel, je lui aurais déjà proposé d’emménager avec moi, imaginez un peu !




J’entendis un chuchotement, petit murmure de la prairie enchantée, qui semblait m’inviter à piger quelque chose dans l’étang. Il y avait là des cannes à pêche et je me saisis d’une. Quelques instants plus tard, je tirais de l’eau un petit coffre aux trésors qui contenait quelque chose qui me permettrait d’avancer dans mes objectifs de vie.




Je sautillais sur place.

- Mais c’était quoi, dans ce coffre ? rit Travis, amusé.

- Une baie de plante Vache ! J’y crois pas !

J’avais rencontré le clown tragique, vu la clairière magique et je rentrais maintenant planter ma première plante Vache, avec quelques frayeurs mais surtout l’impression que ma vie était devenu un grand jeu dans lequel tout était amusant et rien ne pouvait arriver de mal.





J’allais bientôt devoir partir travailler ; nous avions rendu visite à l’arbre dans la nuit, et le petit matin se levait tranquillement, alors j’en profitai pour arroser ma petite plante cornue, puis je décidai d’aller faire un rapide tour au studio car je n’avais rien dans le ventre.




La petite pâtisserie congelée que je réchauffai au four me fondit à la bouche et je savourai avec délice, certaine que je prendrais beaucoup de poids prochainement car c’était définitivement en voie de devenir mon petit plat préféré.




Mais alors, j’eus une promotion en rentrant du boulot, et j’obtins non seulement un chevalet, mais surtout un montant suffisant pour meubler un peu ma maison. Un lit, et de quoi manger, je n’aurais donc plus à squatter mes amis ni à faire des allers-retours incessants au studio, bien que j’appréciasse l’environnement paisible. J’aimais bien que mon petit chez-moi commence à prendre forme, et puis ces nuggets au poulet n'étaient pas mal non plus !




Le lendemain matin, bien que je n’aie parlé à personne des rénovations qui avaient eu lieu dans mon petit chez-moi, je vis débarquer Emily et Callia, qui souhaitaient visiter officiellement les lieux depuis qu’ils avaient apparemment zieuter de la fenêtre et appréciés de voir que ça se meublait peu à peu. Callia avait cuisiné un cake au fruit – beurk -, et nous le dégustâmes en silence, jusqu’à ce que j’entende la sonnette à nouveau.




Tout le monde s’était passé le mot de venir me rendre officiellement une petite visite pour me féliciter d’avoir bâti ma petite maison, ou du moins les fondations de celle-ci. Summer, Travis et Liberty étaient là, mais aussi Johnny, que je n’avais plus revu depuis cette fois au parc. J’étais bien plus en état de lui faire la conversation que cette fois-là et je découvris que j’appréciais beaucoup le grand jeune homme. Cependant, à voir tout mon bel entourage, je me rappelais mes amis de Sunset Valley ainsi que ma famille, et ça vint gâcher momentanément mon humeur.

- Qu’est-ce qui se passe ? chuchota Callia en me voyant baisser les yeux l’espace d’une seconde.

J’allais lui dire que tout allait bien, sur la défensive, lorsque je décidai que de toute façon, c’était mon guide et que je devais au moins tenter de lui faire confiance.

- Mes amis du 3e ère me manquent. Vous êtes parfaits, mais…

- Je comprends. Tu sais, tu peux toujours leur écrire ! Avec un ordinateur, tu peux correspondre avec le 3e ère.

- C’est vrai ?

Je me sentis soudain bien mieux. J’allais pouvoir écrire à ma sœur, à mon père, mes amis, et leur narrer mes aventures. J’hésitais entre me procurer un ordinateur le plus rapidement possible ou attendre et, à la limite, utiliser celui de mes amis ou du studio ?

- Merci, Callia.

Je la serrai contre moi, à sa grande surprise. Elle rit hystériquement et cria un « Mais de rien ! » exagéré, comme si elle voulait attirer l’attention de tout le monde sur mon geste, et c’était probablement le cas, mais je souris, je commençais à m’attacher au curieux personnage.